L’Assemblée nationale a adopté en première lecture le projet de loi modifiant les dates butoirs des négociations commerciales 2024, les portant aux 15 janvier 2024 pour les industriels réalisant plus de 350 millions d’euros de CA en France et au 31 décembre pour les autres.
Sans réelle surprise les députés ont adopté hier soir, 9 octobre, en séance l’article unique du "projet de loi portant mesures d'urgences pour adapter les dispositions du code de commerce relatives aux négociations commerciales dans la grande distribution". Le texte adopté par 69 voix contre 51 acte que les négociations entre distributeurs et grands industriels des Produits de grande consommation pour l’année 2024 devront être terminées au 15 janvier 2024, contre le 1er mars auparavant, et dès le 31 décembre 2023 pour les PME. "La loi fait obstacle à la répercussion immédiate des prix de vente", a défendu Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, pour justifier le projet de loi qu’elle défendait devant l’assemblée nationale, lundi 9 octobre dans le soirée, expliquant qu’avancer la date butoir permettant de "gagner six semaines sur la baisse des prix". "Les prix des matières premières baissent depuis plusieurs mois. Ces baisses de coûts doivent se retrouver dans les prix que nos compatriotes payent à la caisse", a déclaré la ministre déléguée, évoquant des baisses des prix agricoles de -7,4% selon l’Insee.
Le seuil PME / grande marque passe à 350 millions d'euros
Seule modification de taille par rapport au projet d’origine, l’Assemblée a adopté un amendement de la députée MoDem Anne-Laure Babault qui fait passer le seuil maximum de chiffre d’affaires des PME pour lesquelles les négociations devront aboutir quinze jours avant celles des grandes marques, de 150 millions d’euros initialement à 350 millions d’euros de CA annuel hors taxes réalisé en France au cours du dernier exercice clos. Cet amendement a été voté par une coalition rassemblant RN, LR, MoDem, PS, écologistes, communistes et le groupe Liot, contre Renaissance et l’avis du gouvernement. Nul ne sait s’il subsistera après l’examen du projet de loi au Sénat, qui devrait commencer le 23 octobre. Par ailleurs, la date limite de communication des CGV qui était initialement prévue au 1er décembre pour les grands fournisseurs et au 15 novembre pour les plus petits (moins de 350 millions d'euros) a été avancée respectivement au 15 et au 1er novembre, ce qui laissera deux mois pleins aux acteurs pour trouver un terrain d'entente, contre 3 aujourd'hui.
Trois amendements, un rapport et une mission
Dans un communiqué publié ce matin, 10 octobre, Alexis Izard, député Renaissance de l'Essonne et rapporteur du projet de loi, a détaillé les trois amendements adoptés sur l’article unique "parmi lesquels l’avancement à la même date des négociations de l'accord Bouclier Qualité-Prix dans les territoires ultramarins, la réaffirmation du principe d’annualité qui régit les négociations commerciales en France ainsi que la modification du seuil à 350M€ de chiffre d’affaires et une date de négociation anticipée au 31 décembre 2023 pour les PME/ETI inférieures à ce seuil. Également, les parlementaires ont adopté un article additionnel prévoyant la création d’un rapport sur les effets du texte sur les prix de vente et le partage de la valeur." Le député rappelle par ailleurs que la ministre Olivia Grégoire a annoncé le lancement d’une mission gouvernementale transpartisanne pour évaluer la nécessité d’une réforme du cadre global sur les négociations commerciales. Pour le rapporteur, "cette mission est nécessaire pour réfléchir à un édifice juridique plus souple, fluide et offrant davantage de protection pour les maillons les plus faibles de la chaîne comme les consommateurs et les agriculteurs."
Objectif adoption avant la mi-novembre
La loi devrait ensuite passer devant une commission mixte paritaire début novembre pour une publication espérée par le gouvernement mi-novembre, ce qui correspond à la date butoir fixée pour l’envoi des CGV des grands fournisseurs (1er novembre pour les PME). Droite et extrême droite jugent « peu ambitieux » le texte gouvernemental. "Est-ce donc tout ce dont vous êtes capables face à l’inflation", a par exemple interrogé le RN Nicolas Meizonnet. C’est la quatrième fois en cinq ans que le Parlement se penchait sur la législation encadrant les négociations commerciales.
Jérôme Parigi